Intelligence artificielle : « une révolution dans la révolution » selon Ibrahima Nour Eddine Diagne

L’intelligence artificielle (IA) s’impose à une vitesse vertigineuse et bouleverse déjà nos économies, nos savoirs et nos modes de vie. Pour Ibrahima Nour Eddine Diagne, administrateur général de Gaindé 2000, il s’agit d’« une révolution dans la révolution numérique », dont le potentiel reste encore largement sous-exploité au Sénégal.

Il y a un an, à l’occasion de la Rentrée numérique, M. Diagne alertait sur les risques de l’IA sur l’emploi. L’objectif, explique-t-il, était de provoquer un électrochoc : sensibiliser l’État, les entreprises et les salariés à anticiper les bouleversements en cours. Mais depuis, constate-t-il, « aucune évolution majeure » n’a été enregistrée, hormis une réflexion sur un cadre juridique pour une IA responsable.

Pour lui, la véritable transformation dépasse la simple dimension technologique : elle appelle un groupe de travail pluridisciplinaire, capable de produire des recommandations prospectives à court, moyen et long termes, afin de guider la politique nationale.

Le défi africain face aux géants de l’IA

Alors que les géants américains et chinois dominent le secteur et que l’Europe tente de rattraper son retard, le Sénégal ne peut rester spectateur. « Nous n’avons pas le luxe d’attendre des sommets ou des négociations interminables », insiste M. Diagne, qui plaide pour une dynamique africaine autour d’une IA enracinée dans les réalités du continent.

Au-delà de la souveraineté culturelle et stratégique, l’enjeu est aussi économique. « Une banque qui emploie mille personnes pour des tâches qu’une concurrente réalise avec cent salariés grâce à l’IA sera rapidement distancée », souligne-t-il, exhortant le secteur privé à s’approprier ces technologies, sous l’arbitrage de l’État.

Une digitalisation encore inachevée

Interrogé sur l’état de la digitalisation au Sénégal, le patron de Gaindé 2000 se montre critique. Si le pays dispose d’experts compétents et d’entreprises dynamiques, les projets avancent trop lentement. Il pointe du doigt :

  • la dépendance aux partenaires au développement, qui imposent parfois des solutions inadaptées ;

  • la fragmentation et les redondances, qui rendent la dépense numérique « exorbitante » ;

  • et surtout, le manque d’usage réel des plateformes, souvent inaugurées à leur livraison technique, mais peu intégrées dans les pratiques administratives.

« Tant que les citoyens continueront à remplir des formulaires papier dans les guichets, nous ne pourrons pas parler de digitalisation aboutie », regrette-t-il.

Transparence et performance au cœur des enjeux

La crainte de perdre des emplois freine-t-elle cette transition ? « La digitalisation n’affaiblit personne, elle apporte de la transparence », tranche M. Diagne. Le problème, dit-il, est que le Sénégal superpose le digital au manuel sans remplacer l’ancien système, ce qui génère plus de complexité que de bénéfices pour l’usager.

La prochaine édition de la Rentrée numérique mettra ainsi l’accent sur la mesure de la performance. « Il ne s’agit plus de multiplier les projets-vitrine, mais de démontrer les effets concrets : temps gagné, coûts réduits, efficacité renforcée », explique-t-il, prenant l’exemple du passeport numérique et de la carte d’identité biométrique, dont les volets digitaux restent sous-utilisés malgré les investissements.

Pour Ibrahima Nour Eddine Diagne, le défi est clair : recentrer la digitalisation sur l’usage réel et la performance, plutôt que sur des projets coûteux et peu exploités. Faute de quoi, le Sénégal risque de rester en marge de cette « révolution dans la révolution » qu’est l’intelligence artificielle.

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