Pendant des années, il a agi comme un fantôme du Web. Son nom : Kocc Barma, ou du moins son pseudonyme. Derrière ce nom mythique de la cybercriminalité sénégalaise se cachait El Hadji Babacar Dioum, cerveau d’un vaste réseau de sextorsion, de chantage numérique, de diffusion de contenus intimes et de pornographie non consentie.
Il a été arrêté par la Division spéciale de cybersécurité (DSC), mettant fin à l’un des plus longs feuilletons de la cybercriminalité en Afrique francophone.
Une machinerie de l’humiliation numérique
C’est à partir de 2018 que le phénomène « Seneporno » émerge sur le Web sénégalais : une plateforme qui publie des vidéos intimes d’hommes et de femmes à leur insu. Les victimes, souvent filmées à leur insu ou piégées, voient leur vie basculer dans l’horreur numérique. Certains témoignages parlent de suicides, de dépressions, de familles brisées, d’extorsions d’argent, le tout orchestré depuis l’ombre par Kocc Barma.
L’objectif de cette entreprise malveillante ? Gagner de l’argent, mais aussi « punir » certaines personnes ciblées, souvent par vengeance personnelle ou pour briser des réputations.
Une enquête numérique de longue haleine
La DSC, dirigée par le commissaire Pape Mamadou Djibril Faye, a mené un travail d’enquête extrêmement minutieux. Traçage d’IP, analyses techniques, infiltration de groupes privés, exploitation de données bancaires… Rien n’a été laissé au hasard. C’est finalement grâce à un traçage technologique et à la collaboration avec d’autres entités de cybersécurité que le cerveau de Seneporno a été localisé à Thiès, sous une fausse identité.
Comment Kocc Barma opérait
• Utilisation de faux profils sur les réseaux sociaux
• Création de faux concours pour piéger les victimes
• Extorsion d’argent sous menace de diffusion
• Hébergement offshore des vidéos
• Paiement via mobile money ou cryptoactifs
• Changement fréquent de numéro et de localisation grâce aux VPN
La fin d’un règne toxique du Web
Le 11 juillet 2025, à 6 heures du matin, la Brigade d’intervention de la Police met fin à cette traque numérique historique. L’individu est arrêté avec une quantité importante de matériel informatique : téléphones, disques durs, serveurs personnels, noms de domaine, puces, VPN, etc.
La DSC a indiqué que de nouvelles arrestations sont attendues, car Kocc n’agissait pas seul. Plusieurs complices sont déjà identifiés au Sénégal et à l’étranger.