jeudi, mai 2, 2024

NFT (Non-Fungible Token) : de quoi parle-t-on au juste ?

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Jusqu’à un passé récent, la cryptomonnaie — le bitcoin par exemple — a été l’un des moyens les plus connus d’utiliser la technologie blockchain. Mais, à ce jour, la blockchain rend possible une pléthore de cas d’utilisation, dont les NFT. 

Dans cet article, nous allons particulièrement nous intéresser à ces NFT : qu’est-ce qu’un NFT ? Quelle est sa particularité ? À quoi sert-il ? Qu’en est-il de sa valeur ? Voici les questions auxquelles nous tenterons de répondre dans la suite de nos développements.

Avertissement : 

Cet article s’adresse à tous, mais surtout aux néophytes, afin de les imprégner sur les tendances technologiques du moment. Il ne vise aucunement à fournir des conseils en investissement. Faites des recherches plus approfondies avant de vous lancer.

                 D’abord, un NFT c’est quoi ?

Un NFT signifie Non-Fungible Token ou jeton non fongible dans la langue de Molière. C’est un jeton numérique créé et géré à partir d’une blockchain, permettant d’authentifier de manière unique un actif. C’est différent d’un jeton fongible, lequel signifie un jeton qui peut être échangé contre un autre jeton du même type sans qu’aucune distinction entre les deux ne puisse être faite par la suite. En peu de mots, fongible « se dit de choses qui se consomment par l’usage et qui peuvent être remplacées par des choses de même nature, de même qualité et de même quantité » (larousse.fr).

Par exemple, sans entrer dans le débat sur la fongibilité du bitcoin, un bitcoin peut être remplacé par n’importe quel autre bitcoin, car ils sont identiques et ont la même valeur. Le bitcoin est donc un actif fongible. Il en est de même pour la monnaie que nous utilisons au quotidien. À titre illustratif : un billet de 1000 francs CFA est égal à n’importe quel autre billet de 1000 francs CFA, quel que soit son numéro de série. En effet, ces billets sont interchangeables, indiscernables et ont la même valeur. 

C’est tout l’inverse d’un NFT, puisque ce dernier est conçu de façon unique et ne peut pas être remplacé par un autre. Et pour cause : il n’y a pas deux NFT identiques.

 Alors, qu’est-ce qui fait cette particularité d’un NFT ?

Contrairement à un jeton fongible, un NFT (jeton non fongible) se veut d’être unique, indivisible, non interchangeable et donc non fongible. Ceci est rendu possible grâce à la blockchain, laquelle, pour rappel, est souvent définie comme une base de données distribuée, permettant la transmission et le stockage d’informations (transactions, contrats, titres de propriétés, œuvres d’art, etc.) sans organe central de contrôle. Également, la blockchain est connue pour son caractère infalsifiable. Un NFT profite pleinement de cette immutabilité de la blockchain, ce qui en fait un jeton cryptographique impossible à dupliquer ou à modifier. 

Tout comme le bitcoin, l’utilisation d’un NFT requiert la création d’un portefeuille numérique. Metamask et Trust Wallet sont parmi les portefeuilles les plus utilisés. Du côté des blockchains, bien que Binance Smart Chain, EOS ou encore Flow permettent la création de NFT, Ethereum reste actuellement la blockchain la plus utilisée. Les normes ERC-721 et ERC-1155 (multi-token) permettent en effet — via des smart contracts — de les créer, à la différence de la norme ERC-20 dédiée exclusivement aux jetons fongibles.  

Ainsi, selon la norme de jeton utilisée, la blockchain peut faire de sorte que chaque jeton créé ait des caractéristiques uniques le distinguant d’un autre. Ceci étant, les NFT peuvent servir dans presque tous les domaines. 

             À quoi peut servir un NFT ?

Tout ou presque peut être associé à un NFT : une chanson, une vidéo ou même un terrain physique. Par exemple, pour une meilleure gestion du foncier, le service cadastral sénégalais pourrait, à travers cette approche, identifier chaque terrain de façon unique. Dans ce cas, le jeton non fongible ainsi que les métadonnées incluses dans celui-ci (nom, description, lien…) pourraient servir de titre de propriété, par ailleurs infalsifiable et traçable dans la blockchain. C’est d’ailleurs exactement ce qui se passe dans le metavers — sur Decentraland par exemple — où il est déjà possible d’acheter un terrain virtuel certifié sous forme NFT. En novembre 2021, Adidas a même fait l’acquisition de 144 terrains dans l’univers virtuel The Sandbox pour 400 ETH, soit 1,7 million de dollars (Cryptoast.fr, 2021).     

En février 2022, en vue de promouvoir le patrimoine culturel africain en général et ivoirien en particulier, la Poste de Côte d’Ivoire en collaboration avec la société StampsDaq, a procédé au lancement de la première collection africaine de timbres NFT résumant plus de 100 ans d’héritage philatélique africain, selon le DG de la société estonienne StampsDaq (Cointribune.com, 2022).

Comme nous allons le découvrir infra, les jetons non fongibles ont également pris d’assaut le domaine de l’art numérique, où ils servent à certifier des œuvres. Mais avant d’en venir à ce point, faisons d’abord le point sur ce qui fait la valeur d’un NFT.

        Quelle est la valeur d’un NFT

À vrai dire, il est difficile de déterminer la valeur d’un NFT. Néanmoins, la tangibilité, la rareté, la personnalité de l’émetteur ou encore l’utilité restent des facteurs sur lesquels il est possible de déterminer sa valeur.

Jack Dorsey, le cofondateur de Twitter, a récemment vendu son tout premier tweet « Just setting up my twttr » sous format NFT pour 2,9 millions de dollars. Comme vous avez pu le constater, c’est juste un tweet. Mais un tweet à prix d’or ! Alors pourquoi à ce prix ? 

Dans ce cas-ci, au moins deux (2) facteurs entrent en jeu, à savoir la personnalité de l’émetteur du NFT et la rareté.

– La personnalité de l’émetteur :

Il s’agit ici de Jack Dorsey, une des figures de la Silicon Valley. Jack a cofondé Tweeter, l’un des réseaux sociaux les plus fréquentés au monde et aussi Block — une entreprise s’activant notamment dans le Bitcoin. Autant dire que Jack Dorsey est très célèbre, n’est-ce pas ?

– La rareté :

Les NFT sont conçus pour vous donner quelque chose qui ne peut pas être copié : la propriété de l’œuvre — bien que l’artiste puisse toujours conserver les droits d’auteur et de reproduction, tout comme avec une œuvre d’art physique (The Verge.com, 2021). Ceci garantit par la même occasion sa rareté. En somme, ce tweet de Jack est rare puisqu’il est associé à un NFT qui par essence est rare. Bien sûr, même si la rareté n’est pas l’unique raison de la cherté d’un NFT.

Mais souvenez-vous, tout ce qui est rare peut valoir une fortune. C’est notamment le cas pour l’or, le diamant, etc. Justement, un NFT simule cet effet de rareté, mais cette fois numérique. 

Ces deux facteurs ont donc contribué à donner plus de valeur à ce tweet pourtant consultable gratuitement sur Internet. Eh bien, vous vous dites sûrement que ce tweet est à la portée de tous alors ? Oui, c’est exact ! Toutefois, voici toute la différence : seul l’acheteur pourra revendiquer la propriété de ce tweet, parce qu’il est le seul à détenir le NFT qui lui est associé. C’est une sorte de titre de propriété gravé dans le marbre ou plutôt dans la blockchain prouvant qu’il est le propriétaire officiel de l’image numérique du tweet. 

Pour créer, acheter ou vendre des NFT, il existe aujourd’hui de nombreuses plateformes, parmi lesquelles Rarible, Super Rare, Nifty Gateway ou encore Mintable. 

OpenSea.io est toutefois la plateforme la plus prisée. Certains spéculateurs y achètent même des jetons non fongibles à petits prix dans l’optique de les revendre plus cher. Rien ne garantit cependant que ceux-ci trouveront acquéreur. Pire, ils peuvent même perdre de leur valeur entre-temps. La plupart d’entre eux n’ont d’ailleurs aucune valeur et finissent généralement à la cave, mais pas tous ! En effet, certains NFT ont réussi à tirer leur épingle du jeu. 

             Top 3 des NFT les plus chers

Sans plus tarder, voici…                                         

                                           3…THE HUMAN ONE… 

…une œuvre d’art créée par l’artiste Beeple. Cette œuvre d’art numérique mettant en scène un astronaute errant dans des environnements changeants a été vendue le 9 décembre 2021 chez Christie’s (une maison d’enchères) pour la modique somme de 29,9 millions de dollars. Et en deuxième position, nous retrouvons :

                                  2. EVERYDAYS : THE FIRST 5000 DAYS

Comme son nom l’indique, cette œuvre de Beeple est un collage de 5000 images. Ces images miniaturisées ont été réalisées pendant 5000 jours de suite. L’œuvre d’art s’est vendue aux enchères pour quelque 69 millions de dollars.

  1. THE MERGE 

The Merge ! Cette œuvre d’art numérique est le travail d’un artiste anonyme du nom de Pak. Elle a été vendue le 6 décembre 2021 sur Nifty Gateway pour, tenez-vous bien, 91,8 millions de dollars américains, ce qui en fait le NFT le plus cher vendu à ce jour. 

Comme en témoignent tous ces chiffres, les NFT semblent avoir un bel avenir devant eux. En 2021, plus de 44,2 milliards de dollars ont d’ailleurs été dépensés sur ce marché, selon The NFT Market Report de la firme Chainalysis. Cependant, tout n’y est pas rose. Récemment, un hacker a réussi à dérober des NFT d’une valeur de 1,7 million de dollars sur OpenSea. Il faut ajouter à cela les problématiques de droits d’auteur qui y sont régulièrement notées. L’un des derniers cas en date est celui de Spice DAO vs Dune.

Dans les faits, Spice DAO avait acheté lors d’une vente aux enchères un exemplaire du manuscrit Dune pour 3 millions de dollars dans le but de produire une série animée de NFT. Malheureusement, l’équipe de Spice DAO n’avait pas pris en compte un détail qui s’est finalement révélé handicapant. En effet, en droit américain et européen, tout comme en droit sénégalais d’ailleurs, une œuvre tombe dans le domaine public seulement 70 ans APRÈS la mort de son auteur ou de ses auteurs. Problème : Alejandro Jorodowsky, l’un des coauteurs de l’œuvre, est toujours en vie à  93 ans (Journalducoin.com, 2021). Bref, ceci n’est qu’un exemple parmi tant d’autres encore plus intéressants.

      Mamadou Lamine Niang DIA, juriste en droit du numérique. Il a récemment soutenu son mémoire de master dans le domaine de la cryptomonnaie & blockchain.

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