samedi, avril 27, 2024

Une source de solutions pour l’Afrique : comment les Centres d’excellence ouvrent la voie pour l’avenir du continent

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Les solutions développées localement inspirent toujours un fort sentiment de satisfaction. Elles nous emplissent de fierté et d’un esprit d’entreprise qui nous fait nous sentir invincibles. Ces réponses nous donnent foi en l’avenir, sachant que si nous avons pu trouver une solution à un problème, alors avec un peu d’huile de coude, nous pourrons résoudre les dix prochains. J’ai ressenti cet état d’esprit en visitant deux Centres d’excellence africains à Accra au Ghana. Ils se concentrent sur deux grands défis affectant la vie de millions d’Africains : la sécurité alimentaire et la drépanocytose, une maladie génétique touchant les globules rouges.

Des acteurs locaux au service de la sécurité alimentaire

Connaissez-vous le Centre d’excellence ouest-africain pour l’amélioration des cultures (WACCI) ? Moi non plus, je n’en avais pas entendu parler. Cependant ce Centre d’excellence africain pour l’enseignement supérieure (CEA) – un programme régional appuyé par la Banque mondiale – pourrait bien détenir la clé de la sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest et au-delà, malgré les effets dévastateurs du changement climatique. Rien qu’en 2022, 140 millions de personnes supplémentaires ont basculé dans l’insécurité alimentaire en Afrique du fait des événements climatiques et de l’insécurité, d’après les données de la Banque mondiale.  Dans un rapport publié par le Programme alimentaire mondial (PAM), la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou sévère en Afrique subsaharienne s’élevait à 64,2 % en 2021. Le Centre d’excellence a non seulement permis de produire et d’améliorer des variétés de maïs et de riz résistantes à la sécheresse, mais il forme aussi la prochaine génération de phytogénéticiens africains.  J’ai ainsi rencontré des personnalités marquantes comme Sandra Esi Odorkor, qui a quitté les États-Unis pour rentrer au Ghana afin de contribuer à la sécurité alimentaire du pays à travers sa passion pour la sélection des plants de tomates. « C’est pour ma fille que je fais cela, pour qu’elle sache que les femmes peuvent exceller dans les sciences mais aussi pour qu’elle soit fière de la contribution de sa mère à la production des aliments qui sont dans son assiette, » explique Sandra.

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Sandra Esi Donkor se réjouit de trouver les meilleures variantes de tomates pour le Ghana

Sandra Esi Donkor se réjouit de trouver les meilleures variantes de tomates pour le Ghana. Crédit photo : Erick Kaglan

J’ai également eu la chance de rencontrer Amos Rutherford Azinu, employé du WACCI qui mène avec fougue son combat pour fournir des semences améliorées aux agriculteurs commerciaux comme aux petits exploitants. Auparavant Amos travaillait avec le WACCI en tant que technicien de terrain. Cependant, après avoir réalisé les manques au sein de la chaîne de valeur alimentaire, il a décidé de faire cavalier seul en lançant en 2015 le Centre d’amélioration des cultures autochtones (a). Au cours de sa première année d’exercice, sa société a produit une demi tonne de graines de maïs qui ne se sont pas vendues. Mais aujourd’hui, Amos fourni 1 124 agriculteurs au Ghana et trois entreprises de semences, ainsi que des distributeurs au Ghana, au Mali, au Togo et au Burkina Faso, auxquels il fournit des variétés de graines développées par le WACCI.

À ces deux exemples, s’ajoutent des dizaines d’étudiants et de scientifiques en formation pour enseigner, sélectionner, produire et vendre : la réponse à l’insécurité alimentaire en Afrique se trouve ici même, sur le continent. 

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Amos Rutherford Azinu devant son nouveau processeur de semences.

Amos Rutherford Azinu devant son nouveau processeur de semences. Crédit photo : Erick Kaglan

La recherche au service de la santé publique

Je dois reconnaître que c’est à 31 ans (j’en ai aujourd’hui 32) que j’ai découvert l’influence de notre patrimoine génétique sur notre réaction aux médicaments et autres traitements médicaux. C’est au même âge que j’ai découvert que l’Afrique n’avait pas encore entièrement cartographié ses caractéristiques génétiques, à la différence d’autres régions à l’Ouest et à l’Est. Qu’est-ce que cela implique ? Les médicaments, vaccins et thérapies développés en Occident ne sont pas toujours aussi efficaces sur les Africains. Choquant ? Et si je vous disais que l’Université du Ghana abrite un Centre d’excellence africain qui s’est justement engagé à y remédier ? 

En 2019, l’université a ouvert le Centre ouest-africain de médecine génétique (WAGMC) pour s’attaquer à la drépanocytose (ou anémie à cellule falciforme), un trouble génétique prévalant dans notre région. Au Ghana, cette maladie affecte environ un enfant sur 50 naissances vivantes. Le centre a étendu son domaine de compétence au-delà de la drépanocytose et conduit à présent des recherches sur d’autres maladies génétiques.

L’objectif du centre est de former des professionnels de santé qui comprennent et prennent en compte les facteurs génétiques dans les soins médicaux, pour offrir des traitements médicaux holistiques. Le centre a récemment reçu l’accréditation pour son programme de Maîtrise de Sciences (MSc) en Consultation génétique, une première en Afrique subsaharienne, et il est en cours d’accréditation pour son Master de Philosophie (MPhil) et Doctorat (PhD) en Génétique moléculaire médicale.

Pour reprendre les termes du professeur Solomon Ofori-Acquah : « en étant pionniers de la formation en génétique des professionnels de santé, le centre WAGMC aide l’Afrique à dépasser un défi essentiel dans le développement du secteur de la santé sur les troubles génétiques sur le continent. »

Les solutions à nos problèmes sont à notre portée

Les solutions dont l’Afrique a besoin sont ici. Les chercheurs dont nous avons besoin sont sur le continent, prêts à lancer une foule de solutions ciblées aux défis rencontrés dans la santé, la sécurité alimentaire, la gouvernance, et plus encore.  Que reste-t-il à faire ? Il nous faut investir. Comment maintenir de tels investissements ? Il nous faut appuyer la recherche scientifique pour contribuer à élaborer et influencer les politiques dans ces domaines de développement essentiels. Nous devons nous assurer que nos dirigeants et gouvernements partagent la même foi en notre avenir que les grands esprits qui ont choisi de rester sur le continent. C’est ainsi que l’Afrique n’aura plus à importer de solutions car nous les développerons et les exporterons nous-même.

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Le professeur Solomon Ofori-Acquah, pionnier du programme sur le génome.

Le professeur Solomon Ofori-Acquah, pionnier du programme sur le génome. Crédit photo : Erick Kaglan

Par Samuel Kwadwo Owusu Baafi, Consultant

Source: blogs.worldbank.org