mardi, mars 19, 2024

L’Afrique peut faire l’impasse sur les systèmes électriques traditionnels grâce aux technologies énergétiques flexibles

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La capacité de l’Afrique à s’affranchir des systèmes électriques traditionnels en adoptant les énergies renouvelables à grande échelle n’est pas un fantasme.

Des études approfondies de Wärtsilä ont démontré qu’avec le support de technologies d’énergie flexibles, les objectifs africains en matière d’énergies renouvelables sont non seulement réalisables, mais sont aussi la stratégie la plus réaliste et économique pour parvenir à l’électrification du continent.

Un nouveau paradigme de production d’électricité parfaitement adapté à l’Afrique

Il y a eu beaucoup de discussions sur la capacité de l’Afrique à faire l’impasse sur la façon dont les systèmes électriques ont été construits dans le monde occidental. Depuis plus d’un siècle, les systèmes électriques traditionnels sont basés sur la production d’électricité centralisée, avec un nombre limité de grandes centrales thermiques fournissant de l’électricité de base via un vaste réseau de transmission. Cette façon de produire de l’électricité devient obsolète : l’urgence climatique appelle un changement de paradigme à 180 degrés dans lequel les énergies renouvelables remplacent les centrales thermiques comme source d’énergie de base.

Ce nouveau paradigme de production d’électricité est, à bien des égards, parfaitement adapté à l’Afrique. Le continent bénéficie de ressources éoliennes et solaires de très haut niveau, ce qui signifie que les centrales d’énergie renouvelable construites ici affichent certains des meilleurs taux de productivité au monde. Presque partout en Afrique, les énergies renouvelables sont de loin l’option de production d’électricité la moins chère disponible aujourd’hui.

Bien que des objectifs relativement ambitieux en matière d’énergies renouvelables aient été fixés par la plupart des gouvernements à travers le continent, il existe encore un scepticisme généralisé quant à la capacité des énergies renouvelables, intermittentes par nature, à fournir une source fiable d’énergie de base. Ce scepticisme est injustifié : avec le déploiement approprié de technologies d’équilibrage du réseau telles que les centrales électriques à moteur ou le stockage d’énergie, d’énormes quantités d’énergie renouvelable peuvent être intégrées au système tout en garantissant un réseau stable et fiable. Les experts de Wärtsilä, qui ont construit 76 GW de capacité de centrale électrique dans 180 pays à travers le monde, en savent quelque chose.

Construire des réseaux électriques fiables

Oui, les énergies renouvelables sont intermittentes, mais c’est un défi que nous savons gérer depuis longtemps, à condition que les besoins en capacité électrique flexible ne soient pas sous-estimés.

A mesure que les énergies renouvelables intermittentes deviendront la nouvelle charge de base, le système devra faire face à une grande quantité variation des quantités d’électricité, ce qui peut perturber le réseau. Une énergie flexible doit donc être disponible pour augmenter la production au même rythme que fluctue la production éolienne ou solaire, mais aussi pour répondre à la fluctuation de la demande d’énergie dans la journée. Les déséquilibres du système peuvent parfois être énormes, mais le système restera stable tant que le déploiement des énergies renouvelables sera associé à une capacité de puissance flexible correspondante.

Les centrales électriques à moteurs flexibles sont la seule technologie conçue pour fonctionner main dans la main avec les énergies renouvelables, car elles peuvent faire face efficacement à de multiples démarrages et arrêts quotidiens. Elles offrent également l’avantage significatif de pouvoir fonctionner avec différents carburants, à savoir le gaz naturel et le fioul lourd aujourd’hui, et demain l’hydrogène et les biocarburants produits localement. Grâce à cela, les centrales à moteur offrent une grande couverture contre le risque d’approvisionnement en carburant, mais elles constituent également une technologie très durable, puisque les moteurs à gaz peuvent simplement être convertis pour fonctionner aux carburants verts tels que l’hydrogène.

De tels bonds en avant énergétiques nécessitent une approche sur mesure

La mise en place de système à base de renouvelable va être un processus complexe à mettre en place sur plusieurs décennies. Chaque pays d’Afrique présente son propre mélange unique de ressources naturelles, d’opportunités et de contraintes géographiques, de densité de population, ainsi qu’une myriade d’autres paramètres.

Chaque pays aura donc besoin de son propre plan d’expansion du système électrique sur mesure et optimal pour accomplir sa conversion au tout renouvelable.

À quoi ressemblerait un tel plan dans la pratique ? Prenons le Nigeria comme exemple. Grâce aux techniques de modélisation Wärtsilä, nos analystes ont conçu une feuille de route détaillée montrant comment le Nigéria pourrait procéder à la construction d’un système d’énergie 100% renouvelable et atteindre son objectif de neutralité carbone à l’horizon 2060.

Selon nos modèles, d’ici 2060, la capacité électrique du Nigeria devrait être de 1 200 GW d’énergie renouvelable et nécessiter un total de 283 GW de stockage d’énergie et 34 GW de centrales électriques à moteur flexible à des fins d’équilibrage du réseau. D’autre part, les sources d’énergie inflexibles comme les centrales électriques au charbon, au pétrole ou à turbine à gaz seront devenues l’exception plutôt que la norme.

Pour que ce plan réussisse, le gaz domestique du Nigéria doit encore jouer un rôle de transition crucial : il sera utilisé comme combustible de transition peu coûteux pour les centrales électriques, en soutien à la production d’énergie renouvelable intermittente, jusqu’à ce que ces centrales puissent être converties pour fonctionner uniquement à l’hydrogène vert au début des années 2040.

Il s’agit du système électrique le plus pertinent d’un point de vue environnemental et économique. Nos recherches montrent en effet qu’investir dans les énergies renouvelables et la flexibilité des moteurs à gaz et du stockage d’énergie est le moyen le plus direct pour le Nigeria de réduire les coûts énergétiques, d’augmenter l’accès à l’énergie et d’améliorer la fiabilité du réseau. Pour que le plan réussisse, le pays devra cependant améliorer son infrastructure de transmission d’électricité, développer un cadre politique solide et fiable, et attirer des investissements importants.

Le passage aux énergies renouvelables offre à l’Afrique une occasion unique de dépasser les systèmes électriques obsolètes qui ont été la norme en Occident. Saisir cette opportunité représenterait un pas de géant dans le développement du continent. Mais un déploiement adéquat et soigneusement planifié de technologies énergétiques flexibles pour équilibrer l’intermittence des énergies renouvelables est la condition sine qua non pour que ce bond en avant énergétique réussisse aux quatre coins de l’Afrique.

A PROPOS DE L’AUTEUR

Marc Thiriet, né en 1967, diplômé de l’ESTA Belfort et de l’IFCI-ESC Clermont (Ecole Supérieure de Management), a plus de 25 ans d’expérience en développement d’affaires et négociations de contrats de vente (EPC, O&M) dans le secteur de l’énergie, en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie, en Amérique du Sud et en Europe.  Marc Thiriet a occupé divers postes de direction gérant divers P&L à l’étranger, manageant des équipes multiculturelles. Marc Thiriet occupe actuellement le poste de Directeur, Afrique, à Wärtsilä Energy Business.